Usages
Plateforme moodle Éléa
De la didactique des usages numériques
Cet article présente les réponses de Stéphane Brunel à une interview sur l’introduction du numérique invite à considérer différemment le métier d’enseignant pour accompagner chaque élève.
Stéphane Brunel est maître de conférences des universités à l’Université de Bordeaux.

Il est membre du laboratoire IMS - UMR 5218 - CNRS [1]. Il enseigne les sciences expérimentales, la culture technique et technologique. Son champ de recherche est plus particulièrement axé sur la création des connaissances dans les processus industriels. Il y intègre les problématiques liées aux usages numériques et son corollaire l’ingénierie de la connaissance.
Il montre par plusieurs réflexions qu’un va-et-vient est possible entre apprentissage en milieu industriel et milieu scolaire. Il est aussi vice-président de la Fédération Française de Robotique en charge des juniors et vice-président de la Ligue de l’enseignement. Il a obtenu un doctorat de l’Université de Bordeaux 1 dans le département des Sciences physiques et de l’ingénieur en 2008. Sa thèse porte sur l’ingénierie des connaissances en conception de produits et est l’auteur de nombreux articles sur l’utilisation du numérique dans les apprentissages.
Dans son ouvrage, « De la didactique des usages numériques » (Éditions Universitaires Européennes, Juin 2014) Stéphane Brunel et son équipe offrent un tour d’horizon éclairé des usages du numérique pour enseigner et apprendre.
Lors d’un entretien mené en 2019, il a accepté de répondre à nos questions pour mieux comprendre en quoi l’introduction du numérique invite à considérer différemment le métier d’enseignant pour accompagner chaque élève.
Il convient, et la réflexion n’est pas totalement terminée me semble-t-il, d’engager du constructionnisme définit par Papert et de repenser les organisations de classe en intégrant de l’ingénierie de la formation. Pour être plus dérangeant, je pense qu’aujourd’hui le numérique doit nous transformer en pédagogue ingénieur des connaissances. Cela implique une remise à plat de ce que nous appelons la posture et l’acte d’enseigner au profit d’une ingénierie qui intègre, les notions de distances, les notions d’asynchronisme par exemple.
C’est une façon d’envisager l’enseignement un peu iconoclaste mais, nous pouvons bien tenter quelque chose de novateur quand on pense aux milliers d’élèves qui chaque année sortent du système éducatif sans formation et sans diplôme.
Le numérique doit réinterroger les cheminements intellectuels par lesquels les élèves, mais avant eux les enseignants, passent pour rendre intelligible ce qu’ils transmettent. Le but ultime de ce que nous faisons en classe pourrait être résumé de la façon suivante : celui qui apprend doit en fin de parcours être capable de transmettre à son tour
J’aime beaucoup travailler sur des systèmes collaboratifs qui, de façon régulière, sauvegarde l’avancée du travail. On voit bien que le fait d’aider à la conservation de la trace s’apparente plus à une fonction cérébrale de bas niveau que d’une action répétitive essentielle. Ai-je bien pensé à tout sauvegarder ? Ce qui met l’apprentissage à la merci d’une opération technique non connectée à la principale. Voilà un exemple très concret de ce que le numérique permet de faire et d’améliorer. N’oublions jamais que le numérique est un accélérateur du transfert des connaissances et de leur création. Il n’est pas le remplaçant de l’ingénierie qui permet la création et son organisation. C’est un système grandement facilitateur mais, il n’est pas le tout créateur et pourvoyeur.
Trop souvent et très souvent, ce sont les élèves qui doivent se conformer à la façon de réfléchir de l’enseignant. Ce qui dans quelques cas devient très complexe, voire impossible.
À bien y réfléchir, il y aurait dans chaque discipline à redéfinir les invariants cognitifs pour en faire des ressorts d’analyse. Autres exemples possibles : se repérer dans le temps et dans l’espace. Nous travaillons sur d’autres sujets à l’émergence de ces invariants. Par exemple, les invariants des comportements humains lors de travail en groupe dans une équipe d’ingénieurs. À y regarder de plus près, ce sont les mêmes invariants qui peuvent être utilisés dans les interactions de groupe lors d’apprentissage.
Le numérique n’est que l’accélérateur et transperce tous les codes parce qu’il permet de voir et de se rendre compte, plus rapidement que jamais, dans le temps humain, des conséquences des actes que je décide pour moi, avec ou sans les autres.
Mais ce qui est apparu à la fin des élucubrations de cette thèse, c’est que transmettre des connaissances est la phase ultime d’un processus bien plus complexe qu’il n’y parait.
Nous avons montré que transmettre n’importe quoi n’était pas très compliqué. En revanche, transmettre une connaissance pour en faire une compétence, c’est un long cheminement fait d’analyses et de remises en cause. Nous pensons que transmettre s’inscrit dans un processus d’ingénierie de la connaissance :
- recenser les connaissances à transmettre,
- les organiser temporellement,
- vérifier leur bonne réception.
Si on ne fait pas ce chemin, on ne comprend pas bien pourquoi les connaissances s’enchainent les unes aux autres. Il manque, me semble-t-il, une approche plus scientifique à l’élaboration de cette construction. Il nous semble que pour l’instant, nous sommes plus dans la juxtaposition de connaissances, que véritablement dans une construction mentale et cognitive organisée. Le numérique vient alors percuter cet imbroglio. Pour la simple et bonne raison que le numérique n’a pas de frontières et en quelques clics, il permet de sauter d‘une idée, d’un domaine, à la même idée dans un domaine complètement différent avec des implications complètement différentes.
Voilà pourquoi nous avions émis l’idée d’une construction par trois focus différents. À chaque interrogation sur le bien-fondé et la réalité d’une connaissance, nous la passons au filtre des trois instrumentations.
- Premièrement, d’où vient cette connaissance ? Dans quel milieu, elle a émergé, quel est l’environnement dans lequel je la trouve ? Qui la pratique ? Qui la possède ?
- Le deuxième filtre est un filtre symbolico-sémantique qui permet de vérifier l’état théorique de la connaissance en faisant attention à sa pertinence, à sa réalité, à son obsolescence pourquoi pas. Il est plus que jamais nécessaire d’expliciter les représentations sous-jacentes aux expressions communément acceptées. On le voit apparaitre beaucoup dans les formes d’expression parfois complètement libérées et/ou complètement corsetées.
- La troisième instrumentation fait office de conclusion à cet échange. Elle est liée à l’objet physique. Nous avons essayé de le dire plus en avant, nous sommes très attachés à donner du réel à tout acte de transmission des connaissances. Paradoxalement, le numérique peut être un facteur de réalité. J’en veux pour preuve le travail que nous menons depuis bientôt 20 ans en robotique éducative et pédagogique. Donc cette dernière instrumentation doit permettre aux enseignants de se poser la question de la réalité de ce qu’ils transmettent, de l’effectivité de cet acte.
Une des vertus essentielles de ces pratiques réside dans le statut de l’erreur. Je vous invite à vérifier par vous-même l’engouement de nos jeunes le 17 avril à la Villette pour la finale d’Île-de-France. Ils sont engagés dans un processus qui les mènera à Hanovre pour l’Open européen et ensuite à Sydney pour la Robocup Mondial.
Pour aller plus loin
- Stéphane Brunel, (2014). De la didactique des usages numériques, Éditions universitaires européennes, pp.220 En ligne
- Stéphane Brunel (2008), Étude des activités collaboratives de conception en tant que situation d’apprentissage. Application à l’ingénierie des produits et à l’ingénierie didactique. Philippe Girard et Marc Zolghadri (dir.), Bordeaux 1
- Nicolas Balacheff. (2017). « Seymour Papert (1928-2016) aux sources d’une pensée innovante
et engagée », Recherches en Didactique des Mathématiques, La Pensée Sauvage,2017, 37 (2/3),
pp.383-396. En ligne
[1] Le laboratoire de l’Intégration du Matériau au Système (IMS, CNRS UMR5218) a été créé le 1er janvier 2007, par la fusion de trois unités de recherche bordelaises, (IXL, PIOM, LAPS) avec une stratégie scientifique commune de développement principalement centrée dans le domaine des Sciences et de l’Ingénierie des Systèmes, à la convergence des Sciences et Technologies de l’Information et de la Communication (STIC), et des Sciences pour l’Ingénieur (SPI). Le laboratoire est rattaché à trois tutelles, le CNRS, l’Université de Bordeaux et Bordeaux Aquitaine INP. Au CNRS, l’UMR5218 est rattachée en principal à l’Institut des Sciences de l’Ingénierie et des Systèmes (INSIS) et en secondaire à l’Institut des Sciences de l’Information et de leurs Interactions (INS2I). Source : Présentation du Laboratoire IMS.
Ressource(s) associée(s)
Autres Usages de Plateforme moodle Éléa
Plateforme en ligne de création de scénarios pédagogiques
Plateforme moodle Éléa
Étude de Sidney en géographie
Plateforme moodle Éléa
Enseigner de manière hybride avec Éléa
Plateforme moodle Éléa
La différenciation pédagogique avec Éléa
Plateforme moodle Éléa
Comment motiver les élèves à distance avec un parcours de e-éducation ?
Plateforme moodle Éléa
Visite virtuelle d’un parcours de géographie
Plateforme moodle Éléa
Mise en œuvre de PIX avec Éléa
Plateforme moodle Éléa
Conception de parcours Éléa en équipe disciplinaire STMS-BGB
Plateforme moodle Éléa
Des ressources pour le Grand Oral
Plateforme moodle Éléa
Différencier avec des coups de pouce avec Éléa
Plateforme moodle Éléa
Assurer la continuité pédagogique avec Éléa
Plateforme moodle Éléa
Parcours en CP sur le graphème "gn"
Plateforme moodle Éléa
Un escape game sur les femmes scientifiques
Éléa, Genially
La e-éducation, un incubateur de travail en équipe
Plateforme moodle Éléa
Mémoriser avec une plateforme de e-éducation
Plateforme moodle Éléa
Faire réussir chaque élève avec la e-éducation
Plateforme moodle Éléa
Mettre en œuvre la pédagogie inversée sur Éléa
Plateforme moodle Éléa
Les ressources numériques dans la scénarisation pédagogique
Plateforme moodle Éléa
Éléa pour un projet au long court
Plateforme moodle Éléa
Enseigner à distance avec Éléa
Plateforme moodle Éléa
Favoriser l’inclusion scolaire en ULIS
Plateforme moodle Éléa
Ressources pédagogiques transversales 2
Plateforme moodle Eléa, Quizinière, Kahoot
MathALÉA et Éléa : une séance sur la proportionnalité
Plateforme moodle Éléa
Exemple d’utilisation en histoire-géographie
Plateforme moodle Eléa
Sur les traces de mon identité numérique
Plateforme moodle Eléa